Pour contrer les déserts médicaux, il est indispensable de multiplier le temps médical des médecins

Benjamin Hardy
Biloba
Published in
6 min readMar 21, 2022

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La question des déserts médicaux en France n’est pas nouvelle, mais les chiffres officiels font état d’une situation alarmante.

62,4 % de la population d’Ile-de-France est maintenant en zone « rouge ». Plus de 96% des Franciliens font face à des difficultés. Les médecins libéraux dénoncent une « mise en danger des patients ».
Plus d’un Français sur deux s’est passé d’une consultation chez le généraliste, faute de rendez-vous.

Nous ne pouvons pas dire que nous n’avons pas vu venir cette catastrophe sanitaire. Les problèmes sont bien plus profonds que le numerus clausus ou le covid.
Il ne s’agit pas de leur confort quand les professionnels de santé tirent la sonnette d’alarme, mais bien de la qualité de la prise en charge de leurs patients qui est dégradée, du système en lequel ils n’ont plus confiance, et de la maltraitance à laquelle ils sont contraints fautes d’effectifs et de moyens suffisants.

Salles d’attente saturées, journées interminables, prise en charge de nouveaux patients impossible, départs à la retraite non remplacés : les conditions de travail indécentes découragent les jeunes médecins généralistes.

Les déserts médicaux sont simplement un révélateur d’un système de santé qui épuise, n’attire plus, et ne s’est pas réinventé. Il fonctionnait déjà en mode dégradé depuis longtemps et il est au bord de la rupture.

Pas de triage ou régulation digitale en amont des cabinets, des outils pour les médecins totalement dépassés voire inexistants, pas d’interopérabilité des données, pas de socle commun, un modèle économique à l’acte qui n’a jamais évolué… La seule véritable innovation des 10 dernières années aura été Doctolib, permettant la prise de rendez-vous simplifiée, et fluidifiant ainsi grandement l’accès au soin.

La téléconsultation vidéo ? Elle n’a absolument rien changé. Elle prend autant de temps au médecin, ne permet de s’affranchir que du transport, et n’équivaut pas une consultation présentielle. Son apport est insignifiant.
(Si la téléconsultation avait eu un quelconque impact, nous n’aurions pas cette étendue de déserts médicaux aujourd’hui).

En résumé : de moins en moins de médecins, des conditions décourageantes, pas de perspectives d’amélioration… Tous les ingrédients sont réunis pour voir une chute drastique du temps médical.

« Nous sommes dans une situation de démographie médicale catastrophique sur de nombreux territoires. La situation n’est plus tenable et je comprends le malaise de la population, la société est au bord de l’explosion, il faut des mesures d’urgence. »
Professeur Patrice Diot, doyen de la faculté de médecine de Tours.

Le système d’organisation des soins primaires est le même depuis 30 ans.

Des cabinets médicaux, réceptacles de tous les maux de la société, reposants uniquement sur des médecins, sans triage ni délestage : quand les cabinets médicaux débordent, ce sont les urgences qui sont à leur tour en tension, car le seul filtre en amont, le cabinet de ville, est devenu inefficient.

Un rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales de 2021, “La pédiatrie et l’organisation des soins de santé en France”, le constate d’ailleurs clairement : “Les différentes composantes de la médecine ambulatoire de l’enfant sont en crise”. La mission propose un nouveau modèle de prise en charge des enfants pour répondre à l’ensemble de leurs besoins de santé, comme “développer l’exercice des infirmières puéricultrices en ville, avec la réalisation de consultations autonomes, en lien étroit avec un médecin”.

Face à cette situation critique, le temps des rapports et des constatations est dépassé. Il faut prendre des mesures drastiques, avec effets immédiats.

Il est nécessaire de repenser entièrement la prise en charge :

  • mettre le digital au service de cette réorganisation,
  • s’appuyer sur des professions paramédicales adaptées,
  • mais également repenser le modèle économique.

L’enjeu est de démultiplier le temps médical des médecins généralistes et des pédiatres. Il faut pouvoir réaliser bien plus de consultations qu’aujourd’hui, tout en préservant la qualité de prise en charge, et paradoxalement en augmentant le temps consacré aux patients (aujourd’hui sous les 15 minutes !).

Nous avons d’abord besoin de solutions digitales, en amont, pour trier, filtrer, réguler, et donc délester et protéger les cabinets médicaux, permettant ainsi d’économiser le temps médical effectif. Tout ce qui peut être fait hors du cabinet doit être fait à distance.

Il faut ensuite mieux utiliser les professionnels de santé paramédicaux compétents en pédiatrie, et s’appuyer sur eux pour la prise en charge des enfants, en amont et en aval de la consultation médicale. Rassurer, éduquer, conseiller, écouter, prescrire des ordonnances simples, réaliser l’interrogatoire, s’assurer de l’observance… Tout cela peut être réalisé par des infirmières puéricultrices, en digital, ayant toujours la possibilité de communiquer avec un médecin instantanément.

Le temps des médecins doit être essentiellement dédié à l’examen clinique, à l’établissement du diagnostic et à la prescription d’un protocole de soin. Pas de paiement, pas de gestion de carte vitale, pas d’administratif.
Et dans le meilleur des mondes, pourrions-nous également demander que les médecins prennent plus de temps, “le temps qu’il faudra”, avec leurs patients ?

Cela semble presque impossible, pourtant, chez Biloba, nous répondons déjà à la majorité de ces besoins.

Biloba est un service de santé permettant à une équipe médicale pédiatrique pluridisciplinaire de travailler de manière coordonnée et collaborative. Le service, digital, est ouvert 7j/7 de 8h à 22h. Nous répondons quotidiennement à plusieurs centaines de parents qui utilisent notre application mobile pour nous contacter.

Notre équipe médicale est aujourd’hui composée de 65 professionnels de la pédiatrie (51 infirmières, 7 médecins généralistes et 7 pédiatres).
Chaque jour de l’année, environ 15 personnes se relaient sur la plateforme, pour des vacations de 2h à 4h maximum, avec au minimum 3 infirmières et 1 médecin simultanément. Elles travaillent de manière collégiale et coordonnée sur notre propre plateforme technologique, et répondent par messagerie instantanée aux parents. Il n’y a plus de sensation d’isolement pour le professionnel de santé : il travaille de chez lui, mais n’est jamais seul sur la plateforme. Au moindre doute, il a toute une équipe autour de lui avec qui échanger en temps réel.

La combinaison de l’écrit et de l’asynchrone, de nombreux raccourcis d’usages, une contextualisation permanente de l’information, de grandes quantités de données toujours claires et synthétisées : tout cela permet la multiplication du nombre de prises en charge, sans jamais altérer sa qualité, et sans être pressé par le temps. Nous n’aurions pas des milliers d’avis positifs pour une note globale de 4,9/5 sur l’App Store ou le Play Store si ce n’était pas le cas !

En mettant la technologie au service d’une incroyable équipe de professionnels de santé médicaux et paramédicaux, nous optimisons et rentabilisons ce temps médical qui est devenu si précieux. Nous démultiplions la productivité des médecins généralistes et pédiatres tout en améliorant la prise en charge de nos patients-parents-utilisateurs. Il nous est même possible d’augmenter ce temps d’échange pour enfin “prendre le temps qu’il faut” !

Le mois dernier nous avons réalisé 8000 prises en charge pédiatriques. 40% des parents seraient allés consulter s’ils n’avaient pas utilisé Biloba, représentant 100 jours temps plein de médecins.
Nous en avons eu besoin de 15.

Tout ce que nous avons construit est prêt à être multiplié. Chaque composante de Biloba est prête à scaler. Dès demain, en multipliant nos capacités médicales par 10, 30 ou 50, nous pourrons prendre en charge 500 000 personnes par mois.

Nous pensons que c’est la seule façon de compenser l’effondrement du temps médical en France, et en Europe.

Pouvoirs publics, hôpitaux, agences de santé : nous avons la solution, prête à être mise en place dans toutes les régions confrontées aux déserts médicaux.
Qu’attendons-nous pour la déployer ensemble ?

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